Comprendre la géomorphologie de Labarthe-Inard

Essayer de comprendre un brin de géologie à Labarthe-Inard et l’origine de la géomorphologie actuelle.


Le titre semble très ambitieux, compliqué et pourtant l’existence même de notre village dépend du contexte sur lequel il s’est édifié. Des vestiges anciens témoignent d’une présence humaine depuis au moins 10 000 ans mais il faut remonter beaucoup plus loin pour reconstituer son environnement.
Par exemple, l’élaboration de l’actuel « Plan Local d’Urbanisme » doit tenir compte du contexte géologique sur lequel s’est construit le village. Ainsi est-il nécessaire d’analyser de plus près la carte au 1/50 000e proposée par le BRGM.


Il est naturel de distinguer le coteau nord qui porte la D117, le talus boisé avec les côtes de Millon, de la Canaou, des Carcoulès, du château de Lamaguère et la plaine de rivière aboutissant à la Garonne.
 Le résumé de la carte fait référence à des alluvions anciennes sur le coteau, des éboulis constituent le talus et des alluvions récentes réalisent la plaine.
Nous allons tenter de comprendre comment l’ensemble est apparu au cours des derniers temps géologiques.

Le coteau porte des terrains appelés Fw, ils s’étendent de Saint-Gaudens à la côte de Millon. On y trouve de nombreux galets roulés enrobés par de l’argile ocre. La proportion galets-argiles varie selon les zones, certaines sont uniquement argileuses. Ceci explique leur grande humidité persistante en période pluvieuse mais aussi la structure craquelée en fentes ouvertes en période sèche. Les habitants du coteau et ceux qui travaillent ces terres connaissent ces états.


Les galets ont une origine variée, des calcaires, des granites, des grès, des schistes… Ce niveau Fw a une épaisseur de 10/15 m maximum et porte des sols complexes issus de l’altération superficielle de ce qui se trouve dessous, en résumé beaucoup d’argiles, de galets et des limons.

Ce coteau ou terrasse qui domine la Garonne de 50/60 m est attribué à des épandages « mindéliens ».
Que signifie cette description  un peu compliquée : une période glaciaire ancienne, la glaciation de Mindel, s’est manifestée entre – 550 000 ans et -440 000 ans. Les glaciers ont accumulé devant eux de grosses quantités de dépôts variés emportés plus tard par les eaux de fonte lorsque la glaciation s’est achevée. Les fleuves de cette époque ont donc transporté et répandu ces sédiments dans leurs lits, c’est ce qui subsiste aujourd’hui. La vallée de l’actuelle Garonne n’existait évidemment pas.


Ces dépôts reposent eux-mêmes sur des marnes grises épaisses et étanches, c’est le support imperméable de la nappe d’eau de cette terrasse. Le coteau recueille l’eau de pluie qui s’infiltre petit à petit, elle s’accumule dans les sédiments postglaciaires et ressort au niveau de sources : celles de la Canaou, de Couleau, du Carcoulès… L’existence de ces sources a été essentielle dans l’implantation des premiers habitats et donc à l’origine du village.


Bien, mais comment s’est creusée la vallée ?

Un autre épisode glaciaire va se manifester, celui du « Riss » entre – 280 000 ans et -135 000 ans environ.
D’énormes glaciers vont se former sur les Pyrénées en plusieurs épisodes, plus d’un km d’épaisseur, ils pousseront devant eux comme un bulldozer de grandes quantités de débris rocheux et des éléments fins, une moraine frontale subsiste encore à Labroquère près de Saint Bertrand. Ces débris seront altérés, répandus, entrainés lors de la période interglaciaire chaude qui suit. Les cours d’eaux deviennent très agressifs à la fonte des glaces, on peut penser qu’une antique Garonne creuse alors une vallée, un premier sillon ébauche de l’actuel.

A Labarthe-Inard, il ne reste pas de traces visibles de ces dépôts.


L’histoire se répétant, une autre glaciation se manifeste entre – 80 000 ans et – 10 000 ans avec  des alternances « plus froid/moins froid ». C’est la glaciation du « Würm », la dernière glaciation majeure subie par notre planète.
Bilan des glaciations citées :

Cette glaciation conditionne l’implantation de l’Homo sapiens en Europe de l’ouest autrement dit l’homme de Cro-Magnon c’est-à-dire nos ancêtres directs. L’homme de Neandertal, ancien occupant des lieux, est repoussé et disparaît.


A nouveau une calotte glaciaire couvre l’Europe du Nord, de puissants glaciers se forment sur les Pyrénées. La vallée de la Garonne est surcreusée par un glacier en U évasé au sud de Barbazan, les moraines frontales sont détectées au niveau de cette commune. Une période glaciaire se déroule en plusieurs épisodes, des épisodes « moins froids » provoquent  des fontes partielles de glaces, les cours d’eaux se suralimentent et creusent violemment leurs lits.

Ceci est visible à Labarthe-Inard et marqué par les épandages de sédiments dénommés Fy1 et Fy2 (carte géologique), ils sont composés de sables, graviers et galets variés Un surcreusement est présent rue des Pyrénées au niveau de l’ancienne maison Brunet, deux autres au sud de la voie ferrée en allant vers la Garonne, bien connus des cyclistes lors des retours vers le village.
Les sédiments les plus récents sont notés Fz. Nous sommes depuis 10 000 ans dans une période interglaciaire tempérée avec aussi quelques alternances climatiques mineures.


Pour conclure, il découle de cette description que les formes actuelles (ou géomorphologie) de notre contrée et les soubassements géologiques immédiats ont des liens directs avec les périodes glaciaires passées et bien entendu avec l’érosion des eaux de pluie et des eaux de ruissellement rassemblées en ruisseaux, rivières et fleuves. La Garonne au sud, le Soumès au nord, les ruisseaux principaux du village alimentés par les sources du talus ont façonné l’environnement du village et favorisé l’implantation de ses habitats successifs depuis 10 000 ans ou plus.                                                                                                                                        

Jean-Yves Guchereau

Documents: carte géologique de Saint-Gaudens à 1/50 000e remaniée, altitudes et morphologie (atelier urbain Segui & Colomb)
tableau des glaciations cnrs et systemsolaire.free.fr